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La viticulture languedocienne connaît en cette fin d’année une intense activité avant les fêtes qui la clôtureront. Il en ressort trois thématiques principales, objet de toutes les attentions, à l’instar des changements climatiques et des marchés à l’export, ou souci récurrent, comme peut l’être la question de la transmission des exploitations. Trois enjeux, dont le fil directeur, le tronc commun, le socle les relient à un patrimoine millénaire propulsé dans un nouveau monde en train de se dessiner.
Le développement à l’international
« La concurrence n’est plus avec son voisin, mais avec les régions viticoles du monde entier » rappelle l’élu Yvon Pellet. Dans l’optique de redonner une place de choix à notre viticulture à l’international, l’Observatoire viticole du département de l’Hérault organisait le 4 décembre à Montpellier un colloque sur « les nouvelles dynamiques viticoles internationales ». 30% des volumes produits dans le département sont destinés à l’export, en premier lieu vers l’Europe (Allemagne, Belgique, Pays-Bas, Royaume-uni). Chine et Etats-Unis constituent également d’importants marchés. Des délégations de Sud de France Développement , dans une action régionale, et de Montpellier Méditerranée Métropole, liée à des accords historiques avec Chengdu, étaient d’ailleurs reçues en Chine au mois de novembre. Des vignerons, notamment de Pomerols, Pic-Saint-Loup et de l’AOP Grès de Montpellier, faisaient partie du voyage. Pour exemple, 22 vignerons de la Métropole réalisent un chiffre d’affaire d’un million d’euros avec la Chine, appuyés par un système de paiement garanti à la commande par les instances chinoises. Les exportations de vin du Languedoc progressent de + 6,6 % en 2014, et + 7 % déjà en 2015.
Le changement climatique dans la viticulture, notamment en zone méditerranéenne
Hausse des températures, baisse de la pluviométrie, variabilité du climat, modification des terroirs et des caractéristiques des vins touchent et impacteront le Languedoc. COP 21 oblige, le sujet fleurit depuis plusieurs mois dans la presse, occupe conférences et tables rondes, mobilise les chercheurs du monde entier. La métropole languedocienne y prend toute sa part. Un programme national multidisciplinaire, le projet LACCAVE, est co-animé par Jean-Marc Touzard, directeur de recherches à Montpellier. Un pôle unique INRA (recherche) / SupAgro (enseignement supérieur) va être mis sur pied, au service des viticulteurs. Il travaillera sur la diversité génétique, la création de cépages, les pratiques culturales et oenologiques, le marketing, la communication, avec l’aide de start’up locales.
D’un autre point de vue, un mouvement propulsé par la conversion en agriculture biologique et en vins naturels, oppose au tout scientifique, qui a longtemps négligé les questions écologiques, une manière plus libre et plus diversifiée de conduire la vigne et la cave. Basées sur l’observation, le retour aux cépages anciens par exemple, ces pratiques ont posé au coeur de leur action le respect du raisin, du vigneron et du consommateur, de l’environnement. Deux visions, entre scientisme et empirisme, que l’urgence climatique, les défis lancés à l’échelle mondiale feront, qui sait?, marcher dans le même rang. Les solutions préconisées par les chercheurs passeront par des actions collectives et multiformes dont certaines intègrent déjà des méthodes bio et douces, de l’enherbement des parcelles jusqu’aux circuits courts de distribution.
La transmission des exploitations viticoles
Pour parler de marchés à l’export, d’avenir, d’adaptation à de nouvelles conditions de production, encore faut-il qu’il reste des viticulteurs. Troisième défi, et non des moindres, le devenir des exploitations fait souci. La viticulture occupe encore 50% des terres agricoles , mais la pyramide des âges montre un vieillissement inquiétant. Partout, les repreneurs font défaut: 70 % de vignes n’ont pas de successeur dans le pourtour montpelliérain. Les syndicats, les présidents de caves coopératives alertent sur la difficulté à installer des jeunes, de par la lourdeur des investissements, la faiblesse de la rentabilité, la dureté du métier. Montpellier Méditerranée Métropole l’évoquait récemment en conférence de presse, un Plan Local d’Urbanisme à l’échelle intercommunale est en réflexion. Il est conçu comme un outil marquant la volonté de réserver des terres à l’agriculture, à côté de terres vouées au développement démographique et aux autres secteurs économiques.
Les initiatives se multiplient en Languedoc, tant institutionnelles que professionnelles, collectives qu’individuelles, locales qu’internationales. Un mouvement est en marche, autour d’une viticulture traditionnelle en pleine mutation qualitative depuis une vingtaine d’années, au coeur de l’innovation et de l’inventivité, dynamique à la vigne aussi bien que sur un salon à l’étranger. Une viticulture, comme le rappelait le chercheur Jean-Marc Touzard, « qui s’adapte au monde, et le fait depuis 5000 ans »
Article paru le 4 décembre 2015 dans Montpellier-Infos et Thau-Infos