L’automne s’est invité discrètement au calendrier. Températures élevées, grand soleil et absence de pluie ont concouru à donner au mois d‘octobre des airs d’été indien sur le littoral méditerranéen. Impossible dans de telles conditions de travailler la vigne. Le paillage de l’enherbement naturel a desséché, la terre trop dure ne peut être débarrassée de ses mauvaises herbes. Difficile de pas piaffer d’impatience devant cet automne en panne, où seuls les sangliers, pourchassés, passent encore dans les rangs.
Les fermentations s’étirent en fûts. Les soutirages [1] du début de mois ont dessiné deux qualités pour l’élevage : moût provenant exclusivement de raisins passerillés, en surmaturation, et moût des premiers tris, sachant que ce millésime sera essentiellement consacré à l’élaboration de Prima Ora. Le peu de quantité récolté, la concentration des raisins en sucres, les arômes déjà présents, promesses de grand millésime, ont conforté notre décision. A nous d’être dignes, dans le long travail d’élevage qui s’annonce, de cette qualité !
Automne où les témoignages convergent vers les Clos de Miège, faisant signes d’amitié et de reconnaissance : l’Originel voyageant à Santa Cruz et San Francisco, Fabrice Bertrand, historien animateur du groupe Montpellier, histoire, patrimoine et souvenirs, célébrant mon travail patrimonial et viticole, Jean Milon et Martial Potel m’offrant une place dans leur performance artistique à Sète, comme autant de cailloux semés sur la voie d’une culture du vin multiforme, sans barrières.
Automne en latence, où les recherches en archives, réflexions et synthèses achevées, les travaux patrimoniaux menés pour des professionnels du vin ne m’appartiennent plus. Ils nourriront des dynamiques pour la viticulture actuelle, dans la perspective d’une histoire levier d’innovation, comme je l’ai toujours conçue.
Sans pluie, mais la vigne parée des couleurs du vin naturellement doux, avec quelques raisins oubliés, novembre s’annonce, avec la mise en bouteille de Prima Ora 2015 et une audacieuse surprise à la clé.
[1] Décantation du vin par pompage d’un fût vers un autre pour le débarrasser d’impuretés