Les voies du vin sont impénétrables. Cherchant des renseignements sur les cépages anciens, il arrive de découvrir une œuvre, un homme.
Une célébration est passée inaperçue en 2015, celle du tricentenaire de la mort d’un de nos plus grands botanistes. Pierre Magnol (1638-1715) a ouvert la voie à une école renommée d’études botaniques, à Montpellier, qui trouve ses prolongements depuis le XIXe siècle dans les recherches sur la vigne et le vin. De Charles Flahaut à Francis Hallé, du premier Jardin des Plantes créé en France en 1593 à Montpellier Sup’ Agro, en passant par Jules-Emile Planchon identifiant le phylloxéra, des hommes et des structures universitaires entrent dans la continuité de cet homme, en son temps le plus célèbre botaniste de France.
Il ne subsiste pourtant de lui qu’une plante, ramenée d’Amérique par Charles Plumier, baptisée en son honneur magnolia , un buste dans le Jardin des plantes et un nom de rue, discrète, dans Montpellier. Ironie du sort pour ce protestant mis à l’écart des postes prestigieux, la voie s’étire à quelques pas de la Cathédrale Saint-Pierre.
Issu d’une lignée d’apothicaires, Pierre Magnol poursuit ses études au sein de la prestigieuse université de Montpellier. Il obtient brillamment son Doctorat en médecine en 1659, puis le brevet, honorifique, de médecin royal en 1663. Mais c’est pour la botanique qu’il se passionne. « Il se livra entièrement à l’étude de la science aimable, parcourant pendant près d’un quart de siècle la campagne languedocienne et cévenole» écrit le Dr Dulieu à son sujet[1]. Sa réputation grandit en France, passe les frontières. Les principales sociétés savantes d’Europe s’attachent ses services. Les étudiants, dont Joseph Pitton de Tournefort, ou plus tard Antoine et Bernard de Jussieu, se pressent nombreux à ses herborisations. Après avoir abjuré la foi protestante en 1685, il se voit confier le titre de professeur royal, puis de directeur du Jardin des plantes de Montpellier, avant d’en être nommé inspecteur à vie. En 1706, il fait partie des fondateurs de l’Académie Royale des Sciences de Montpellier, puis entre à celle de Paris en 1709.
Pierre Magnol recense les plantes du Languedoc, en dénombre plus de deux mille, cherche à les ordonner. Jusqu’alors, elles étaient le plus souvent rangées en fonction de vertus médicinales. Mais un flot de variétés nouvelles afflue en Europe au XVIIe siècle. Ses travaux, notamment son court (79 pages) mais décisif Prodromus historiæ generalis plantarum (1689), débouchent sur une nouvelle classification, en « familles », en espèces, puis en affinités d’espèces comme pour les animaux, selon des caractères communs d’ensemble.[2]
Sa remarquable finesse d’analyse inspire son élève, Bernard de Jussieu, sur le chemin des classifications botaniques modernes. En décédant en 1715, il quitte la lumière et une gloire qui s’est toujours refusée à lui.
[2] « J’ai reconnu que les animaux se divisaient en familles, distinguées par des caractères spéciaux… J’ai retrouvé tous ces degrés d’affinités dans les plantes. (…) Il y a entre certaines plantes une ressemblance et une affinité qui n’apparaît pas dans les parties séparées, mais qui résulte de l’ensemble »
Pierre Magnol et les cépages du Languedoc
|
Sur les traces de Pierre Magnol
|
Article paru le 13 février 2017 dans Montpellier-Infos, Thau-Infos, Agde-Infos et Béziers-Infos