La nature s’est endormie sous des températures dont nous avions perdu l’habitude. Les gelées, parfois sévères, se succèdent dans un froid sec et ensoleillé. La vigne profite de ces conditions favorables. « Une bonne gelée vaut engrais » rappellent les anciens. Mon ami Guy Ratier, vigneron en biodynamie en Pic Saint-Loup, le confirme pour les vins biologiques: « Les gelées hivernales sont des travailleuses naturelles du sol (soufflage du sol en surface). Elles tuent une grande partie des herbes, ce qui rend plus facile les premiers labours, diminuent les pressions, des maladies telles que le mildiou et black rot, ainsi que celle des insectes, larves, sauterelles… Donc les gelées (tant qu’elles ne sont pas à -20°c ) sont très favorables en bio ».
L’enherbement naturel des rangs de vigne a été conservé, plutôt que de semer des légumineuses. Trop de risque de convier toute la faune locale à un grand festin! La biodiversité retrouvée se mesure également à la variété de la flore présente, qui éclaire la qualité de la terre, en sous-sol. Bêchant pour un prélèvement, on se prend soudain à répéter les gestes ancestraux, portant la terre en bouche tant elle sent bon.Pas de quartier, en revanche, pour les mauvaises herbes, qui ont migré des rangs vers les pieds de vigne. Un plan d’attaque est mis en route pour les prochains mois. Pour l’heure, la taille démarre, selon notre calendrier habituel, sans nous départir de l’idée que « taille tôt, taille tard, rien ne vaut la taille de Mars ».
Le travail en cave a pris lui aussi ses quartiers hivernaux. Les vins ont fini ou finissent leurs fermentations. Le dernier passerillé, très paresseux, se réchauffe à température ambiante.Au premier soutirage, nous sortirons des fûts les grosses lies et cristaux de tartre. Puis nous préparerons les voiles de 2017. Ces micro-organismes prémunissent le vin de déviations par des bactéries. Ils forment, comme une toile d’araignée au- dessus du vin, en un fin filament blanc. Pour parfaire l’élevage, une arrivante de 400 litres a rejoint le chai. Elle conforte mon intérêt pour les grands contenants pour les vins blancs, tout comme, en vins doux, l’opportunité de travailler avec des fûts ayant reçu de l’alcool, ici de l‘Armagnac. Nous renouons là avec l’élevage traditionnel languedocien en muid présent dans les sources historiques.
En dégustation, les vins, pourtant sans intrant chimique, en particulier sans sulfites ajoutés, offrent une clarté impressionnante. Les maturités jeunes délivrent des notes classiques de coing, ou, plus étonnantes, de fraise, des arômes floraux, de citronnelle et tilleul, et même de rose, déjà présente lors des premières dégustations. Les passerillés exhalent des arômes fruités, de coing, abricot, figue et même marron!
Il est l’heure, fin janvier, de prendre ses quartiers dans les salons viticoles. Exercice sportif cette année, avec la concomitance de Vinisud, à Montpellier, et Millésime Bio déplacé à Marseille. En on, en off pour, de l’autre côté du miroir, retranscrire des impressions, des tendances. Sans nul doute, tendance femmes cette année: les Vinifilles, du Languedoc, au Musée Fabre, des femmes du vin à Vinisud, des vigneronnes en vins bio épatantes à l’honneur: Edith Bez, au clos d’Isidore qui chemine sur ses « sentiers pourpres » auréolés de récompenses et de médailles, tout comme Valérie Ibanez au Domaine de Roquemale. Un mouvement, une place que d’autres femmes ont décidé de prendre en main et d’amplifier. Heureuse de faire partie de #WomenDoWine!
Je ne peux terminer ce tour d’horizon sans partager une bonne nouvelle aux Clos de Miège: le lancement de notre certification en vins biologiques.
Domaine de la Vieille, Guy et Julien Ratier à Saint-Matthieu de Tréviers
Nous avons beaucoup parlé des nouvelles cuves, dont deux oeufs en béton. A suivre …