La jeune AOP Languedoc-Grés de Montpellier tenait pour la première fois salon en ville les 10 et 11 décembre à l’Hôtel Saint-Côme, siège de la Chambre de commerce et d’industrie. Vaste et jeune appellation, créée en 2002, elle couvre quarante-six communes, rassemble une cinquantaine de producteurs, et des terroirs comme autant de trésors. Protégés des vents du nord par les Cévennes et nourris d’influence maritime, ils ont en commun les sols pauvres de leurs collines, enserrant la métropole en un vaste amphithéâtre. Dans ces grés, cailloux en occitan, l’appellation puise son nom.

Inauguration du Salon par J-M Sevestre, O. Durand et J-B Cavalier

Elle a d’abord cherché à dégager une typicité de ses vins, une identité gustative autour de ses cépages, grenache, syrah, mourvèdre, qui respirent le Languedoc viticole actuel. Une trame s’est construite autour d’une finesse, d’une fraicheur et d’une élégance reconnues. De son hétérogénéité, l’AOP a su tirer une force : renforcer la cohésion d’un groupe, créer « une bande de copains » se plaît à dire Philippe Peytavi, du Clos de l’Amandaie. C’était tout le sens du discours d’Olivier Durand, président de l’AOP, à l’inauguration du salon. Elle en a tiré une diversité enthousiasmante qui se révèle autour des tables: de jeunes vins et des vins de garde (ah ! le mourvèdre de vieilles vignes du Château Saint-Martin de la Garrigue fait pour vieillir quinze ans ! ), des châteaux emblématiques, Flaugergues ou Claud Bellevue en tête, comme une relève tout sourire au Chai d’Emilien, ou au Domaine de Saint-Jean l’Arbousier. Des Commanderies templières ou des chais en attente de permis de construire, des hébergements en château jusqu’aux cabanes dans les bois, les domaines viticoles offrent tous les visages. Venus des confins de l’AOC, comme de son cœur, venus en nombre d’Assas ou d’Aumelas, de Montagnac, avec deux des plus beaux domaines du Languedoc, tous expriment une qualité de vins, un souci cultural. Jean-Marie Sevestre, vice-président de la CCI, le souligne : « Les vignerons de l’AOC Languedoc-Grés de Montpellier sont animés par une exigence de qualité : les cépages sont sélectionnés avec soin et le travail de la vigne s’effectue dans le respect de l’environnement. Cette AOC dynamique a opéré sa conversion en Bio pour près de 50% des domaines». Les vignerons présents se déclarent satisfaits de ce coup d’essai, à l’image du Clos Sorian, dont Robert Neff, commercial dit son « plaisir d’être là. Il règne dans les grés de Montpellier, depuis 13 ans, une bonne ambiance, une bonne dynamique. Ce salon est une finalité, et l’opportunité d’avancer tous ensemble. Il est très prometteur pour la suite.

 Hall d’accueil Hôtel Saint-Côme,©jackie Clapié, CCI

La jeune AOP affirme tout autant une identité singulière, ancrée dans un patrimoine paysager, rural et métropolitain à la fois. Lors de sa balade annuelle  dans Montpellier, de ses dégustations professionnelles, comme au Château d’Assas au son des clavecins anciens, elle entretient un rapport aigu avec son histoire vers lequel tous, vignerons et institutionnels, convergent. En tenant ce premier salon à l’Hôtel Saint-Côme, l’appellation manifeste son attachement à la ville, constitutive de son nom, initiatrice de son renom. C’est d’ailleurs la métropole qui soutient la bouteille syndicale des Grés de Montpellier rappelle Oliver Durand. Pour Jean-Marie Sevestre, le choix de l’Hôtel Saint-Côme n’est pas un hasard : « Nous renouons avec l’histoire. Le vin y est inscrit dans l’ADN du bâtiment », son fameux vitrail du hall d’accueil, ses gypseries qui évoquent les vendanges et ses ferronneries d’art aux grappes de raisin. Installés ici depuis 1801, les membres de la CCI ont misé sur l’économie viticole, signant de nombreux traités de commerce, organisant la cotation des vins jusqu’en 2008. « L’émotion historique est là, il faut la cultiver » appuie Jean-Benoît Cavalier, président des AOC Languedoc, rappelant « la dimension culturelle importante du vin ». Une dimension que les visites œnologiques au Musée Fabre, mêlant art et vin, ou la conférence sur l’histoire des Grés tenue par Jean Clavel, fondateur des AOC Languedoc, initiateur du renouveau des terroirs languedociens, sont venues conforter au cours de ces deux journées.
La manifestation s’inscrit également  dans le projet de Route des vins, du patrimoine et des métiers d’art mené depuis 5 ans par la CCI. L’objectif est de promouvoir le patrimoine héraultais au sens large (architecture, accueil, productions, activités) mais aussi de vérifier l’offre oenotouristique, créer des événements dans les domaines viticoles, ou participer à des festivals gastronomiques, comme les Toqués d’Oc. En filigrane, s’inscrit la volonté de valoriser la destination, de conforter une filière et de développer l’économie du département. Jean-Benoît Cavalier le dit avec force : « Le vin est né autour de la Méditerranée. Encore aujourd’hui, notre région est la plus importante de tout le bassin en termes de production ».
Au cœur de la CCIT, départementalisée à partir du 15 décembre, le vin, point d’entrée du territoire vers les produits de son terroir, ses paysages, ses hébergements, son histoire, un art de vivre, résonne comme porteur de courants commerciaux et d’échanges culturels, vecteur et source d’espoir d’une nouvelle économie, une oenoculture dans laquelle les Grés de Montpellier font entendre leur identité.

Au cœur de l’Ecusson : l’Hôtel Saint-Côme
L’Hôtel Saint-Côme a été élevé de 1751 à 1757 par l’architecte Jean-Antoine Giral avec les fonds légués par François Gigot de Lapeyronie pour servir l’amphithéâtre au collège de chirurgie.
Lapeyronie, chirurgien parti à la capitale en tant que barbier du roi, anobli en 1721, crée l’académie de chirurgie. Il lègue par testament en 1757 100 000 livres aux chirurgiens de Montpellier pour l’édification d’un bâtiment, sur le modèle de l’amphithéâtre Saint-Côme à Paris. Deux corps séparés par une cour, le composent. L’un, de forme octogonale à l’extérieur, renferme l’amphithéâtre destiné aux démonstrations d’anatomie, et l’autre abrite les salles destinées aux assemblées des chirurgiens.
Une leçon inaugurale est donnée le 25 avril 1757. L’école de chirurgie est supprimée en 1792, et le bâtiment vendu au profit de la Nation. Le 2 janvier 1801 la Bourse de commerce de la commune de Montpellier s’y installe. La Chambre de Commerce et d’Industrie l’occupe depuis 1920.

La Chambre de Commerce
Le 15 janvier 1704, un arrêt du conseil du Roi « ordonne de quelle manière sera fait l’établissement de la Chambre particulière de Commerce dans la ville de Montpellier ». Le roi Louis XIV a 61 ans. Le Languedoc s’étend alors de Toulouse à Viviers et compte environ 1,3 million habitants. L’économie du Bas Languedoc est représentée par le vin, le commerce, la draperie, les tanneries, la soie et la chimie. La Révolution supprime temporairement les Chambres, qui sont rétablies par le consulat de Bonaparte, époque à laquelle l’hôtel Saint-Côme sera destiné à un rôle consulaire.
Le statut moderne des Chambres de Commerce date de la loi Boucher du 9 avril 1898 qui en fait des établissements publics administratifs. Elle compte aujourd’hui 32000 entreprises réunies en son sein.

Article paru le 12 décembre 2016 dans Montpellier-Infos, Thau-Infos, Agde-Infos

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